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Il était une fois Mohamed Al-Fayed

Il était une fois Mohamed Al-Fayed

Mohamed Al-Fayed
Il était une fois Mohamed Al-Fayed,Mohamed Al-Fayed
Ce vendredi 1er septembre 2023 a été annoncé le décès de Mohamed Al-Fayed. Il existe plein d’hommes d’affaires dans tous les pays et beaucoup d’hommes d’affaires égyptiens cependant ce qui m’a laissé écrire ces lignes c’est que Mohamed Al-Fayed était beaucoup plus qu’un homme d’affaires. C’était un personnage. Un personnage haut en couleur (ملأ الدنيا وشغل الناس). Sa vie aura été un roman qui s’est confondu avec l’Histoire contemporaine de l’Égypte, des pays du Golfe surtout l’émirat de Dubaï et du Royaume-Uni.
Il y a eu beaucoup d’histoires et de versions sur son parcours mais la véritable histoire, il l’a raconté dans une interview en 2011. Mohamed Al-Fayed avait la fibre du commerce dès sa jeunesse, il vendait des objets à ses camarades de classe. Contrairement à la version répandue qui raconte que c’était un docker et que c’est en rencontrant Samira Khashoggi (sœur du milliardaire saoudien Adnan Khashoggi) sur une plage d’Alexandrie qu’il a été introduit dans le monde des affaires et qu’il a fait fortune, Al-Fayed avait une toute autre histoire.
C’était un jeune transitaire qui a vu son entreprise confisquée après l’abolition de la monarchie en 1952 en Égypte et l’instauration du socialisme par Nasser quant à son mariage avec Samira Khashoggi il fut très bref et il s’est rapidement brouillé avec son frère. Après la confiscation de son entreprise, il quittera l’Égypte et fondera une entreprise de transport maritime à Gênes. En 1964, il s’installera à Londres. Ce qui a fait basculer sa vie et lui a permis de changer de dimension est sa rencontre avec Cheikh Rached Al-Maktoum (le père de l’actuel émir de Dubaï) à la fin des années 1960. Dubaï était encore sous mandat britannique, c’était un émirat désertique pauvre et les Émirats arabes unies n’existaient pas encore. Il devait convaincre des sociétés britanniques pour construire des terminaux au port de Dubaï qu’il a découvert quand l’un des ses bâteaux y est tombé en panne. Dubaï possède très peu de ressources pétrolières contrairement à Abou Dhabi, il devait au cours de sa deuxième mission dont l’a chargé Cheikh Rached trouver une société qui accepte de faire de la prospection pétrolière. Il a réussi les deux missions et pour chacun des projets, il a empoché une commission. Et ça a continué comme ça jusqu’à la fin des années 1970.
Ce que les gens ne savent pas c’est que les deux premières personnes qui ont amassé une fortune colossale à Dubaï avant tout le monde et sont considérés comme les bâtisseurs de Dubaï sont Mohamed Al-Fayed et Mahdi Tejir (Un homme d’affaires émirati d’origine iranienne né à Bahreïn qui sera par la suite après la fondation des Émirats arabes unis, le premier ambassadeur de ce pays au Royaume-Uni et dans plusieurs pays européens et il le restera pendant longtemps. Il est connu également pour être le propriétaire du Hilton Park Lane à Londres). Quand Dubaï était un désert, ils étaient les deux personnes à l’origine de tous les projets aux côtés de Cheikh Rached Al-Maktoum. D’ailleurs, les deux étaient à l’origine du Dubaï World Trade Centre, longtemps plus haut immeuble de Dubaï.
À la fin des années 1970, il a été exclu des affaires à Dubaï et s’est tourné vers les investissements en Europe. Il a racheté House of Fraser à Londres, propriétaire de Harrods et d’une série de grands magasins dans tout le Royaume-Uni. Un rachat laborieux et une guerre commerciale l’a opposé à l’ancien propriétaire de l’établissement Tiny Rowland car Al-Fayed n’a jamais été accepté par l’establishment britannique et le Royaume-Uni a toujours refusé de lui octroyer sa nationalité. Il fera de l’intérieur de Harrods un temple égyptien et fera en sorte que ce décor soit construit d’une manière qui ne peut pas être démonté, d’ailleurs ça a été classé.
Il rachètera par la suite l’hôtel Ritz à Paris et signera un bail de 50 ans avec la ville de Paris pour reprendre la Villa Windsor. D’ailleurs dans une interview, il dira que les Anglais l’ont combattu quand il a investi chez eux et à Paris Jacques Chirac alors maire l’a décoré.
Évidemment, la blessure de sa vie était la mort tragique de son fils Imed alias Dodi avec la princesse Diana le 31 août 1997 dans le tunnel de l’Alma. Mohamed Al-Fayed décédera mercredi 30 août 2023 soit exactement 26 ans après son fils et dont il était persuadé jusqu’à la fin de ses jours qu’il a été tué. La mort de Dodi restera la blessure de sa vie. Cet après-midi, il a été annoncé qu’il est décédé, que la prière funéraire a eu lieu après la prière du vendredi à la Mosquée de Regent’s Park et que par la suite il a été enterré. Il repose désormais aux côtés de son fils Dodi.
Voilà l’histoire de Mohamed Al-Fayed qui mérite ces lignes et surtout la page de Dubaï largement méconnue de sa vie mais qui a été à l’origine de sa fortune colossale. Les gens connaissent qu’al-Fayed était propriétaire de Harrods, du Ritz et du club de football de Fulham mais tout cela n’aura jamais été possible sans Dubaï.
Tel est l’histoire de Mohamed Al-Fayed, une histoire où se mêlent la gloire et le tragique, où Orient et Occident cohabitent et où l’Histoire contemporaine de trois pays a façonné l’histoire de la vie exceptionnelle d’un homme hors du commun.
Qu’il repose en paix.

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